Wednesday, July 17, 2013

LE CHAGRIN


"Le chien suivait l'enterrement du maître.
Il pensait aux caresses;
Et il pensait aux coups.
Les caresses étaient plus fortes...

Dans le cortège, on s'indignait beaucoup.
On excusait la veuve - elle était comme morte.
On pardonnait à la maîtresse
(Elle était morte aussi).
Mais, qu'en la présence du prêtre,
La bonne ait pu laisser vagabonder ainsi
Ce chien au milieu du cortège!
Ah! Ces filles vraiment ne se font nul souci.
Quelqu'un, l'ordonnateur, la famille, que sais-je?
Aurait dû l'obliger à attacher le chien!
Elle-même, voyons!C'est une propre à rien
Que n'avait même pas l'excuse du chagrin.
Pourquoi la gardaient-ils? Une ménage d'artistes..."


Jean Anouilh, Fables, Paris: La Table Ronde/Folio, 1978, p. 16.

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